Emmaüs Nicopolis: la communauté des Béatitudes
Situé à mi-distance entre tel Aviv et Jérusalem, là même où débute le corridor constituant, ce qui fut durant des siècles, l’unique voie d’accès permettant de relier Jérusalem à son port, Jaffa ; Emmaüs marque l’entrée dans la fameuse vallée d’Ajalon où Josué arrêta le mouvement des astres lors de la bataille qui l’opposera aux armées ammoréennes rassemblées.
C’est dans cette zone géographique reliant les hauteurs stratégiques que constitue les monts Judée aux plaines se prolongeant jusqu’à la zone côtière, que se déroulèrent une partie des batailles les plus décisives dans l’histoire de la région.
Depuis l’antiquité, à travers la grande bataille des Macabées face aux armées séleucides, en passant par les structures stratégiques de l’époque croisée tel que le monastère de Latroun jusqu’à l’époque moderne comme en témoigne aujourd’hui, le musée des blindée, le tracé de la ligne verte ou encore l’ancien poste de police britannique.
Mais c’est ici un autre type de victoire que l’ont vient célébrer dans cette Emmaüs Nicopolis (La ville de la victoire), celle de Jésus sur la mort, et l’annonciation publique de sa résurrection à ses disciples à travers les témoignages qui seront relayés à Jérusalem par Cléopas et son compagnon de leur rencontre avec Jésus ressuscité.
L’église et sa communauté
De remarquables ruines des époques romaine, byzantine et croisée s’enchevêtrent et vous permettent de passer successivement à travers la maison de l’évêque de la ville à l’époque byzantine, une grande basilique, une autre église de la même époque , une église de la fin de l’époque des croisées , un beau baptistère, des restes du système de drainage des eaux vers les thermes d’eaux chaudes et curatives, à l’origine du nom de la ville, ou encore carrières et même éléments de nécropole de l’époque romaine .
C’est autour de ce cadre d’une grande richesse archéologique que choisit de venir s’établir des 1993 des membres de la communauté des béatitudes, fruit de la volonté de restructuration et d’ouverture de l’église catholique après le concile de Vatican II, cette communauté historiquement fondée par un protestant converti au catholicisme, continu d’entretenir un particularisme basé sur un attachement aux fondamentaux de l’histoire chrétienne, et ici encore plus qu’ailleurs, à sa relation avec le judaïsme en tant que frère ainé dans la foi pouvant s’illustrer par une réception du shabbat dans une liturgie en hébreu qui ne substitue en rien mais s’ajoute à la journée du seigneur.
Le bâtiment qui surplombe aujourd’hui l’ensemble consiste en un bâtiment blanc, appelé « Beit ha’shalom » maison de la paix (plénitude). Edifié au début des années 30 par des membres de l’ordre de la congrégation des pères de Betharram, il va successivement se voir transformer sous le mandat britannique en centre d’internement pour citoyens allemands durant la période de la seconde guerre mondiale, puis après la création de l’état d’Israël en poste d’observations de la communauté internationale avant d’être loué par le CNRS, pour finalement passer sous l’administration de la communauté des béatitudes.
Une des pièces de cette maison de la paix fut convertie en église. Intégralement dédiée à la méditation et l’introspection, le silence y règne. Quelques belles icones et un majestueux triptyque en tissu où la première et la dernière lettre de l’alphabet hébraïque ont remplacé l’Alpha et l’Omega et où, au-delà de la rencontre entre Jésus et ses disciples à Emmaüs, des illustrations du buisson ardent mais aussi d’Abraham et d’Isaac ou encore de Jean Baptiste, orne une pièce volontairement épurée autour de la présence de l’autel.
A l’extérieur, une pièce a été aménagée et transformée en une sorte de partie muséologique pourvue d’un petit film didactique expliquant gracieusement aux visiteurs la riche histoire d’Emmaüs et de ses environs à travers les siècles.
La tradition
Apparaissant uniquement dans l’Evangile selon Luc chapitre 24 13-32, elle décrit précisément la deuxième des trois réapparitions connues à travers les évangiles de Jésus après sa mort et sa résurrection, auprès de deux de ses disciples. Le lieu est connu comme le lieu de la fraction du pain, que les groupes de pèlerins du monde entier viennent célébrer et symboliquement reproduire dans une des différentes chapelles mises à leur disposition sur place.
Cette identification des lieux comme Emmaüs reste une des quatre identifications qui durant l’Histoire tentèrent de fixer la localisation de cet épisode biblique. Les trois autres alternatives sont connues comme l’Emmaüs des croisés, l’identification franciscaine et celle de Flavius Joseph, mais c’est bien l’Emmaüs Nicopolis en tant qu’identification byzantine qui fut entérinée à l’époque moderne grâce à la vision de la sainte carmélite Mariam Baouardy.